Séminaire du 24 janvier 2024 – Compte Rendu

Séminaire du 24 janvier 2024 – Compte Rendu

PEINDRE, ECRIRE, DECRIRE, INVENTER UN MONDE : Les lieux montpellierains du peintre RICHARME (1904-1991)

Présents : 42 personnes
Animation : Hélène Guérin, Daniel Bartement (géographe – écologie urbaine et géopoétique), Kadidja Zbairi (architecte doctorante rhétorique des politiques publiques : le lieu du patrimoine artistique et intellectuel à Montpellier), Régine Monod, présidente de l’association Richarme– Excusée Ingrid Junillon, conservatrice musée Paul Valéry- Wang Yinan décalage horaire
Invités en lien : Jean Luc Vives, médiathèque Emile Zola, Bruno Cosme, délégué régional à la fondation du patrimoine
Association : 12 personnes – Etudiants : 6 – Public : 16 personnes

Timing : Début : 14h35 fin 18h30

Présentation des intervenants par Hélène 

Régine Monod : Richarme, 3 regards complémentaires sur le paysage

Résumé de sa vie, sa naissance à Canton il y a exactement 120 ans, ce que lui ont apporté ses parents. La petite fille qui grandit en Chine, l’adolescence à Lyon dans la famille paternelle puis en Savoie dans la famille maternelle. La jeune femme mariée à Jean, Chasseur alpin, la naissance des 3 enfants, la mort de sa mère puis de la 2ème fillette. La guerre. Montpellier.

Sa vie de peintre : un pinceau en main dès l’âge de 5 ans. Une formation très courte à Paris : la grande chaumière, l’installation à Montpellier, la guerre, les expositions, « sa naissance dans l’art » en 1944.Un atelier à Montpellier, mais Paris pour rencontrer la critique. Toute une vie consacrée à son art. 700 huiles, des milliers de dessins et gouaches, tous les thèmes abordés, mais à sa manière, entre abstrait et figuratif : le motif n’est que prétexte… j’empreinte une idée dans la nature, tout le reste vient de moi, construction, transposition, couleur et passages.

Le paysage est envisagé à travers 6 lieux autour de Montpellier… dessins, gouache, extraits de son journal et poésie pour donner à voir et à entendre la Vignette et le quartier de l’Aiguelongue, les printemps en ses jardins, Montferrier et le pic Saint Loup (notre Sainte Victoire), Sète la ville chérie, les étangs autour de Maguelonne et Montpellier.

Pour aller plus loin, rappel des publications, du film et du site.

Daniel Bartement : Paysages et lieux comme figure d’une géopoétique chez Richarme

Explicite le rôle du géographe qui crée un monde. Pour lui une première rencontre avec Richarme fut avec les oliviers de la Vignette devant le théâtre qui en porte le nom et qu’il a contribué à sauver.

Un autre titre possible aurait été : La Vignette, d’une destruction à l’autre. Evoque la construction d’une université modèle sur les ruines de la Vignette, puis sa défiguration totale par la construction du cube énorme de l’Atrium.

Richarme est née « à Lyon » : A côté de la géographie naturelle, il y a la géographie polarisée. Depuis la Renaissance Vénitienne, Lyon accueille les livre et les soieries. Les activités autour de ces 2 pôles font que la région lyonnaise englobe toutes les villes et région en rapport avec ces activités : La Chine avec à l’époque Canton et la firme Jardin et Mathesson qui y envoie Georges père de Richarme en raison de sa sensibilité aux couleurs, mais aussi Damas, origine des épices et pigments ou Montpellier et les Cévennes pour la recherche sur la pébrine et l’élevage du ver à soie.

Donc en quelque sorte, Richarme est née « à Lyon » et a vécu et créé « à Lyon » …

Puis nous montre quelques œuvres pour traduire la sensibilité hors du commun de Richarme qui nous peint le territoire d’un monde en changement, sait saisir l’âme du lieu, traduire la biodiversité…

Au passage, sur un premier dessin, nous parle de la transition énergétique avec la traction hippomobile, le pylône et les huiles Védol, puis, avec le petit printemps, de biodiversité et d’écologie (inventée à Montpellier à l’école d’Agro), et revient enfin à Lyon, le Rhône et les pylônes de haute tension, évoquant au passage l’histoire de la compagnie Nationale du Rhône, puis du bas-Rhône avec Philippe Lamour et ses projets de ville nouvelle…Termine sur l’observation des pratiques avec 2 dessins, évoquant l’un le ramassage sur la plage, et l’autre une barque sur le canal à Palavas, une barque qui n’est pas latine et pas amphidrome comme elle le devrait ici.

Daniel conclu qu’avec ses tableaux on pourrait faire toute une l’iconographie sur l’aménagement du territoire.

Puis il évoque la qualité du regard de celui qui évoque le paysage et admire celui de Richarme qui a su saisir (sans savoir particulier). Ce qui est en train de se jouer entre un ancien monde et un nouveau monde qui se dessinait en oblitérant l’ancien.

Hélène souligne alors l’intérêt pour des étudiants en thèse de ce travail interdisciplinaire qui permet de croiser les regards sur un paysage.

Hélène Guérin : L’œuvre peint et les écrits à la lumière de ses sources. Une bibliothèque d’artiste comme mémoire, voyage et rencontre.

Ce séminaire est la première pierre de quelque chose qui aboutira en fin d’année ou en 2025 à un colloque sur les bibliothèques d’artiste à Montpellier.

Dans ces recherches sur les bibliothèque d’artiste, ils sont accompagnés par le réseau « Paysage Occitanie ».

1er point évoqué : Ecrire l’histoire de l’Art est très difficile, nous, historiens d’art, manquons de rigueur et de pratiques / archives. C’est grâce aux historiens, aux philosophes et aux littéraires que nous pouvons aborder la question de la « réception » de l’œuvre d’art.

Nous nous regardons la forme, la structure des œuvres, ce qui détermine leur spécificité, leur ouverture au monde, à des mondes…Un philosophe a dit « une œuvre d’art crie le monde ». Et Richarme l’évoque souvent dans ses textes : « ma peinture est un cri ». En fait tout discours sur l’art est satellite. En brodant sur la place de l’œuvre (contemporain ou autre) on évite de parler de l’œuvre, on évite de voir.

Et il faut d’abord voir. Hélène nous présente 3 œuvres :

Ce sont des ciels. Il y a là un procédé de dilatation du ciel par rapport à la surface terrestre. Un grossissement des effets météorologiques. Un effet de loupe comme dans les peintures de la renaissance. Cela semble être à la base de son processus pictural et cela renverse le fameux débat entre figuratif et abstrait qui est une opposition à dépasser. Toute œuvre d’art est une œuvre abstrayante qui extrait du monde un élément pour créer un monde propre à l’artiste.

Paul Klee : « l’art ne rend pas le visible, il rend visible »

Paul Valéry : « l’Art c’est ce qu’on n’aurait pas vu sans l’art »

Parce qu’elle avait vu les ciels de Richarme, en rentrant hier au soir au-dessus de la Paillade, elle a « vu » et photographié un ciel magistral avec toutes les couleurs résultant des brumes issues des étangs soumis à l’anticyclone.

L’expérience artistique est une sorte de méditation qui nous permet « d’être au monde ».

2ème point évoqué : Pourquoi un travail sur la bibliothèque ?

Richarme a beaucoup peint, beaucoup écrit, beaucoup lu, et nous a laissé une bibliothèque riche des ses lectures, de ses notes insérées et de ses dédicaces qui peut nous permettre de comprendre son œuvre, de découvrir son univers mental, psychologique, spirituel mais aussi de voir quelles étaient ses références artistiques et sa sociabilité à travers les dédicaces. C’est une sorte de musée mental.

En histoire de l’art, il est rarissime d’avoir une bibliothèque attestée. Le plus souvent on s’est contenté de témoignages direct ou indirect à partir de correspondances, d’échanges avec les proches ou les vendeurs… Ex les travaux actuels autour de Van Gogh.

Cette recherche sur les bibliothèques existe déjà depuis un certain temps en Angleterre ou en Italie, mais s’avère t récente en Français : 2010 à Genève avec Dario Camboni sur celle d’Odilon Redon, 2013 par Ségolène Le Men sur celle de Monet, et Hélène Guérin en 2015 sur celle de François Sabatier.

L’inventaire de cette bibliothèque commencé en 2023 par l’association Richarme (Christiane Bariber, Pascale Rouquette, Francine Tolron, Francine Aleu et Brigitte Pontier) a permis de relever 900 références, de les classer par thème… il existe même quelques ouvrages de géologie dont les notes montrent son intérêt pour la matérialité des paysages peints.

L’ensemble sera mis en ligne sur le site des bibliothèques d’artistes du XIXe au XXIe piloté par Ségolène Le Men. Il sera suivi par une publication et participera au premier colloque sur les Bibliothèques d’artistes.

Quel est l’intérêt d’une bibliothèque par rapport au journal d’un artiste.

Dans un journal dit « intime », le discours est différent car il y a toujours un lecteur potentiel. L’expression est donc filtrée, orientée. (Note de RM : ses filles nous ont confié que pour certains écrits du journal, elle faisait un brouillon).

Des journaux intimes sont publiés régulièrement.

Dans les notes laissées sur ou dans un livre il y a son véritable travail intellectuel. C’est un face à face avec elle-même.

Cela nous révèle également sa sociabilité grâce aux dédicaces qui apparaissent. Sociabilité étroites des personnes proches de La Vignette puis de Psalmodie où elle tenait Salon, Sociabilités plus larges, René Huygues, Henry Agel, qui tout deux témoignent d’admiration et de chaleur amicale.

Dédicaces aussi qui révèle entre Montpellier et Sète un monde connu à l’international …mais pas à Montpellier : celui rassemblé autour de l’admirable revue d’expérimentation artistique : « Dire » créée par Jean Vodaine et qui rassemblait de nombreux artistes et écrivains dont Masri, Jacques Temple, Léopold Sédar Senghor ………et Richarme

Autant de pistes de recherches qui vont s’ajouter à celles existant autour de l’œuvre peinte et des écrits…. Sans oublier le lien avec la Chine de son enfance grâce aux photos de son père et aux gouaches de sa maman :

Wang Yinan, département des arts et jardins et du territoire. Université des minorités nationales, Dalian : Les aquarelles de Jane Richarme sur la rivière des perles.

Le décalage horaire et les délais très court ne lui ont pas permis d’envoyer la capsule prévue. Se fera plus tard. Envisage une exposition à la mairie de Canton. Remercie l’association pour la mine extraordinaire de documents qui lui permettra de retrouver les paysages de Shenzen, totalement oblitérés par l’industrialisation et sur lesquels ils n’avaient quasiment rien. S’inscrit dans la politique actuelle en Chine de retrouver l’image des lieux d’origine.

Richarme intègre AWARE !

Colette RICHARME entre dans le cercle international des artistes femmes du XXème siècle publié par AWARE (Archives of Women Artists,

Pour que vive RICHARME

Samedi 10 juin 2023 à 19h Gazette Café, 6 rue Levat (près de la gare), Montpellier Pascale et Dominique Rouquette

Colette Richarme à Pézenas

Du 12 mai au 05 novembre 2023 Musée Vulliod Saint-Germain de Pézenas L’exposition « Colette Richarme, une peintre dans le siècle

L'oeuvre dans les musées

Où voir Richarme en musée ?

Musée Fabre, Montpellier

19 huiles,78 oeuvres papier et 3 carnets

Musée Atger, Montpellier

81 oeuvres papier

Musée Paul Valéry, Sète

12 huiles 82 oeuvres papier et 7 carnets

Musée Albert André, Bagnols-sur-Cèze

21 huiles et 14 oeuvres papier

Musée d’Art Sacré, Pont St Esprit

14 huiles, 44 oeuvres papier et 1 carnet

Musée Calvet, Avignon

1 huile

Centre national Jean Moulin, Bordeaux

1 huile

Musée Hofer-Bury, Lavérune

1 huile et sa gouache préparatoire

Médiathèque centrale Emile Zola, Montpellier

Des écrits et des oeuvres papiers

Centre de la mémoire, Oradour

1 livre poème illustré

Archives départementales d'Annecy, Annecy

En dehors des musées, Richarme est aussi visible dans la région de Montpellier

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